Green-grey shield, 1959

Josef Albers entame une carrière d’instituteur à l’âge de 20 ans avant de s’engager en 1913 dans une formation artistique à Berlin, puis, à partir de 1916, à l’École des arts et métiers d’Essen où il apprend l’art du vitrail. En 1920, il intègre l’école du Bauhaus de Weimar, ouverte depuis peu. Le cours de Johannes Itten sur la couleur, très orienté vers la réflexion spirituelle, sera déterminant pour son œuvre à venir. Après le départ d’Itten en 1923, Albers reste au Bauhaus pour y enseigner : il va assurer le « cours préliminaire » et diriger l’atelier de peinture sur verre de 1923 à 1933, date de la fermeture de l’école par les nazis. Comme Walter Gropius et Mies van der Rohe, Albers émigre alors aux États-Unis dont il devient citoyen en 1939. Ayant créé un cours sur la couleur, il enseignera dans les meilleures universités du pays où il diffusera l’esprit et les idées héritées du Bauhaus.
Après une longue période abstraite et géométrique, Albers, théoricien et peintre, commence en 1949 une série de peintures qu’il va développer jusqu’à la fin de sa vie sous le titre générique d’Homage to the Square. Le choix du carré s’applique au format des tableaux ainsi qu’aux surfaces colorées peintes dans une facture neutre. Ces œuvres sont pour l’artiste un moyen de montrer que, selon son environnement, son intensité ou son étendue, une couleur n’est jamais la même et varie en fonction de ces paramètres, ce qu’il appelle « la relativité et l’instabilité de la couleur ». Dans Green-Grey Shield (1959), la tension entre la puissance du vert de cobalt et la tonalité chaude de la terre de Sienne est apaisée par la neutralité du gris. Ce tableau appartient à une série de quatre peintures de même format dans lesquelles certaines de ces teintes sont confrontées à un autre contexte chromatique. Avec une grande économie de moyens, les œuvres d’Albers témoignent d’une riche sensibilité et appellent à une forme de contemplation.