Tout petit et très grand

Pour la 18e édition de ses expositions hors les murs, le musée de Grenoble est accueilli par la bibliothèque Arlequin du 23 mai au 17 juin. Un ensemble de 12 œuvres du 20e siècle, issu des collections permanentes du musée, sera présenté pendant un mois. Le thème de l’exposition a été proposé par l’équipe de la bibliothèque en s’appuyant sur les personnages des contes, cette collection étant une spécificité de la bibliothèque Arlequin dans le réseau de Grenoble.

Comme toujours, la sélection présentée reflète à la fois la diversité et la richesse des collections du musée. Mêlant peintures, sculptures, dessins et photographies, elle montre à quel point les œuvres d’art peuvent être de véritables tremplins à l’imagination. Les visiteurs pourront ainsi découvrir des personnages fantastiques, certains minuscules d’autres gigantesques, des animaux extraordinaires ou encore des paysages mystérieux, à la fois proches et lointains. Une véritable invitation au voyage dans des univers multiples, de l’infiniment petit à l’immensité du ciel.

A l’occasion de cette exposition, les espaces de la bibliothèque Arlequin seront transformés : les contes et albums jeunesse déplacés dans d’autres espaces de la bibliothèque ; des cloisons temporaires installées afin de présenter les œuvres dans les mêmes conditions qu’au musée.

Le musée de Grenoble au cœur des quartiers

Depuis 20 ans le musée propose des expositions hors les murs pour aller à la rencontre des Grenoblois au sein même de leur quartier. Pour célébrer cet anniversaire, le musée a choisi de retourner à la Villeneuve, alors que le quartier fête également ses 50 ans. La première exposition du musée hors les murs avait en effet été présentée sur la mezzanine du Patio au printemps 2003. Et le musée était revenu une première fois , en 2015, déjà à la bibliothèque.

Accueil des publics dans l’exposition

Un médiateur et une médiatrice du musée sont présents en permanence dans l’exposition pour accueillir, échanger avec le public, présenter les artistes et les œuvres. Des visites guidées ludiques, adaptées selon les âges, sont également proposées pour des groupes d’établissements petite enfance, écoles, centres de loisirs, familles, adultes…

Entrée libre et gratuite.

Philippe Favier, Tabarin, 1982 © Adagp, Paris
Patrick Tosani, Niveau 0, 1990 © Adagp, Paris
Georges Bru, Variation 6, 1981 © Adagp, Paris
Stephan Balkenhol, Sans titre, 2000, © Adagp, Paris
Gyula Kosice, M Azul, 1956 © Gyula Kosice
Pap Badiane, Nuit d’Afrique, 1978 © droits réservés
Louise Bourgeois, Femme maison, 1947, © The Easton Foundation / Adagp, Paris

La parole aux acteurs


Guy Tosatto, directeur du musée de Grenoble

« Quand je fais le bilan de ces 20 années d’expositions hors les murs, c’est une très belle aventure. On avait vraiment démarré avec beaucoup d’enthousiasme. Et cet enthousiasme s’est maintenu au fil des années et des équipes qui se sont succédé. Nous avions le désir d’aller dans les quartiers à la rencontre de publics qui ne viennent pas au musée, de mener quelque chose de l’ordre de l’expérimentation à chaque fois : parce que chaque lieu pose des questions différentes, parce que chaque quartier a son identité à Grenoble. C’est aussi un formidable moyen pour les équipes qui travaillent ce hors les murs de prendre des contacts avec les gens de terrain, de ressentir les attentes, d’échanger. Quand on parle aujourd’hui de transition démocratique, le hors les murs en est un outil formidable parce que ce sont des projets qui s’élaborent toujours d’abord à l’écoute des attentes des habitants ou à travers les travailleurs sociaux, les responsables d’associations… Pour moi le bilan est extrêmement positif.

Ce hors les murs a une saveur particulière puisque c’est le vingtième anniversaire, qu’on se trouve dans le quartier où on a fait le premier. Cette édition nous permet de voir le chemin parcouru entre il y a 20 ans et aujourd’hui, comment les équipes se sont perfectionnées, se sont professionnalisées. Cette année la thématique est assez amusante, on a eu une demande très spécifique sur les mondes miniatures, finalement on a joué sur les deux versants, tout petit et très grand. On est à chaque fois surpris du rendu final. Ce qui nous frappe, c’est la capacité des œuvres à s’adapter aux différents contextes dans lequel elles sont présentées, comment leur rapprochement leur fait dire des choses qu’elles ne disent pas habituellement.
Je crois que c’est peut-être aussi un des aboutissements du hors les murs qui nous a conduit à imaginer l’exposition « En roue libre » au musée en 2022. Il y a vraiment des allers-retours entre le travail dans les quartiers et celui qu’on conduit ici, au sein de l’institution. Le plus grand aller-retour dont on puisse rêver - et auquel on travaille à chaque édition – serait l’aller-retour des visiteurs entre le quartier et la place Lavalette. Que l’appréhension à l’égard d’un lieu culturel comme le musée de Grenoble puisse tomber. Que ce lieu puisse paraître un petit peu moins intimidant. On joue beaucoup sur cette idée de la proximité, proximité avec les œuvres, proximité avec la médiation, proximité avec l’institution. »

Isabelle Westeel, Directrice de la bibliothèque municipale de Grenoble

« L’accueil d’un « musée hors les murs » dans une bibliothèque est toujours un événement important, porteur de rencontres, de partage et créateur de synergie. Je suis arrivée à Grenoble fin 2017, l’année de l’exposition HLM « Au rythme des formes » à la bibliothèque Abbaye-les-Bains. J’ai tout de suite compris que cette proposition, qui croisait l’art et la musique, était magique pour les équipes et pour le public, démultipliant les approches possibles de différents arts et thématiques. Plus tard en 2021, l’exposition HLM « La vie des arbres », initialement programmée en 2020, a été présentée à la bibliothèque Alliance et a permis d’embellir des temps encore difficiles en raison de l’épidémie en cours. Ce fut un très beau succès et un véritable réconfort pour le public.
En 2022, les bibliothèques de proximité, Teisseire Malherbe et Eaux-Claires Mistral, ont souhaité accompagner les musées HLM dans ces quartiers en proposant de découvrir les collections d’art contemporain de l’artothèque municipale par une exposition temporaire et aussi par la possibilité pour toutes et tous d’en emprunter les œuvres originales : une artothèque hors les murs dans cette même démarche d’aller à la rencontre des habitant-es. En 2023, la bibliothèque Kateb Yacine propose une exposition sur la thématique retenue. À chaque fois donc de très belles opportunités pour multiplier les occasions d’accueillir les publics dans les lieux culturels.»

Trois questions à...

Elsa Vernay, Responsable de la bibliothèque Arlequin

 1- Pouvez-nous nous parler du projet du « musée hors les murs » ?

« C’est un événement très positif pour l’équipe. Travailler avec une autre structure de la ville permet de s’enrichir mutuellement. Ce que j’apprécie, c’est qu’on travaille vraiment ensemble en amont : on a choisi le thème avec l’équipe du musée, ce n’est pas un projet qui arrive tout ficelé, c’est plus facile pour notre équipe de se l’approprier.
Notre rôle est d’accompagner les publics, de travailler avec les médiateurs, notamment sur l’accueil. Ça a tout son sens dans un quartier comme celui-là où les gens vont très peu au musée ; les enfants y vont avec l’école, mais ils n’y retournent pas. C’est une chance d’avoir le musée ici ! Ce que j’aime bien, c’est que ça nous bouscule, c’est toujours bien de bousculer ses habitudes. Ça crée une surprise dans la bibliothèque : le fait d’avoir changé la disposition des espaces, les gens voient qu’il se passe quelque chose, et nous aussi on voit les choses autrement. Le réaménagement qui avait été fait pour l’édition de 2015 avait été flagrant et avait eu un impact durable : c’est la venue du hors les murs qui a fait qu’on a aménagé un coin des petits ici. »

2- Comment avez-vous choisi la thématique de l’exposition ?

« Depuis trois ans, on essaye de mettre en place un temps fort sur le conte. On a organisé une première édition sur Charles Perrault et à cette occasion, on a monté une exposition avec des illustrations des collections de la bibliothèque d’étude et du patrimoine et de la Bibliothèque nationale de France (des reproductions, pas des originaux). On exposait aussi des livres patrimoniaux de la BEP. J’aime bien amener le patrimoine dans le quartier, c’est un peu la même approche qu’avec le musée : les enfants voient des livres anciens et pour eux c’est assez magique. C’est l’occasion pour nous de dire aussi que le conte ce n’est pas que pour les enfants.
Nous avons organisé un deuxième temps sur le thème de la sorcière. Et puis, cette année, on avait prévu de faire une troisième édition sur le thème « grand et petit » : les ogres, le petit Poucet… alors lorsqu’on a reçu la proposition du hors les murs, on s’est dit qu’on ferait le temps conte à l’occasion de la venue des collègues du musée. Que veut dire Être enfant dans le quartier ? Quel regard portent les enfants sur le monde des adultes et vice versa ? On s’appuiera sur les nombreux livres de la bibliothèque et l’exposition pour tenter d’y répondre. »

3- Quelle est l’impact du musée hors les murs sur le public ?

« Nous avons eu du mal à retrouver notre fréquentation après le covid. Je me dis que cet événement va peut-être contribuer à faire revenir du monde : ça bouscule un peu le fonctionnement, il y a des choses qui se passent, c’est un peu différent.
La force de cette exposition bien sûr c’est que les médiateurs soient là. C’est une super opportunité : on a rarement cette occasion-là, de pouvoir discuter avec les gens qui travaillent dans le musée. C’est quelque chose qu’on met beaucoup en avant quand on parle du projet au public.
Et puis, c’est aussi l’occasion de monter toute une programmation : les ateliers créatifs du mercredi après-midi pour les enfants mais aussi pour les adultes, une soirée lecture de textes en lien avec le thème de l’exposition. Et pour la première fois, nous allons faire un atelier d’écriture, dans « le petit musée ». »