Jeanne d'Arc à cheval

L’iconographie de Jeanne d’Arc, jusqu’à l’œuvre de Marie d’Orléans, découle principalement de deux modèles : celui du monument en bronze élevé au XVIe siècle sur le pont des Tourelles à Orléans, avec Jeanne en armure à genoux, tête nue et longue chevelure, et celui connu sous le nom de Jeanne des Échevins (1581) du musée Historique et Archéologique de l’Orléanais, une Judith germanique en robe décolletée à taille haute, un béret à cinq plumes sur la tête, l’épée pointe en l’air. En 1824, Paul Delaroche avait ouvert une voie à un romantisme teinté de réalisme en peignant Jeanne d’Arc malade est interrogée dans sa prison par le cardinal de Winchester. Dix ans plus tard, Marie d’Orléans réalise une version audacieuse et moderne qui balayait deux siècles et demi de tradition. Fille de Louis-Philippe et de Marie-Amélie de Bourbon-Sicile, Marie d’Orléans apprend le dessin dès 1822 auprès du peintre Ary Scheffer, mais c’est surtout à partir de 1832, date à laquelle elle est séparée de sa sœur Louise, mariée au roi des Belges, qu’elle se consacre à l’art avec passion. Au Salon de 1833, elle découvre l’œuvre de Barye et quand, en 1834, Scheffer l’engage à s’initier à la sculpture, son talent s’y affirme aussitôt. Marie révèle son imagination et son tempérament mélancolique dans les sujets d’inspiration littéraire ou historique. Sur les conseils de Michelet, elle lit la Chronique dite de la Pucelle, qui lui suggère sa Jeanne d’Arc à cheval : « Et considérant la grande destruction d’Angloys se prist à plourer la pucelle. » Jeanne est représentée les cheveux courts, coiffée d’une toque très simple, l’armure couverte d’une huque. L’épée baissée dans la main droite, elle incline doucement la tête vers le corps gisant sous sa monture, comme pleurant à la vue de l’ennemi mourant, dont le visage est rendu avec humanité. En 1835, Louis-Philippe commandera à sa fille une statue de Jeanne d’Arc pour Versailles. Marie concevra la figure d’une guerrière en armure plongée dans le recueillement qui connaîtra un grand succès. Mariée en 1837 au duc de Wurtemberg, Marie d’Orléans meurt à 25 ans de maladie pulmonaire. Le plâtre de Grenoble est l’une des trois épreuves moulées sur la maquette originale pour épargner le modèle avant la première fonte en 1835. Deux des quatre bronzes répertoriés sont conservés au musée Condé à Chantilly et au musée des beaux-arts d’Orléans.