La Bourne à Pont-en-Royans

Louis VAGNAT
1869
46,6 x 30 cm
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix
Acquisition :
Legs de Léonce Mesnard en 1890, entré au musée en 1902 (carton sans numéro, n°2370)

Voir sur navigart

Ce paysagiste grenoblois – élève de Théodore Ravanat dont il suit les cours à l’école municipale de dessin de Grenoble – ne choisit définitivement la voie difficile de la peinture qu’en 1876, abandonnant alors son emploi dans la banque. Dès lors, il participe au Salon des Amis des Arts de Grenoble de 1870 à 1883 avec des paysages à l’huile ou des dessins représentant des vues pittoresques du Dauphiné. C’est avec Le Torrent de Breda à Allevard, conservé au musée de Grenoble[1], qu’il est accepté par le jury du Salon de Paris en 1880. Il rejoint son maître Ravanat à Proveysieux, ce petit village dans le massif de la Chartreuse où se réunit à partir de 1866 toute une communauté de peintres et d’intellectuels. Le calme de ce coin retiré, propice à la contemplation et à l’observation de la nature encore sauvage, devient très vite le centre d’une véritable école de peinture régionale. Dans ses paysages, Louis Vagnat affectionne les coins de nature préservés des activités humaines, les vallons moussus et les cascades aux flots mouvementés. Ce dessin, précisément daté de 1869, montre en revanche un site façonné par la main de l’homme et particulièrement remarquable des environs de Grenoble : Pont-en-Royans, petit village situé au pied du massif du Vercors. « Rien de plus pittoresque et de plus hardi que la situation de Pont-en-Royans, petite ville bâtie au flanc d’un rocher à pic, dans une gorge étroite sur la rive droite de la Bourne, à trois lieux et demie de Saint-Marcellin. Elle doit son nom à un pont jeté entre deux montagnes, à soixante-douze pieds au-dessus des eaux écumantes de la rivière ». Cette description dans le volume des Voyages pittoresques et romantiques de l’Ancienne France consacré au Dauphiné accompagne une lithographie du site due au talent de Léon Sabatier, qui avec Justin Ouvrié, Victor Petit, Eugène Cicéri, est chargé par le baron Taylor de dessiner les lieux les plus marquants de la Province. En imprimatur de cette planche parue dans l’ouvrage en 1854, est inscrit : « dessiné d’après nature et lith. par Sabatier », ce qui tendrait à rendre l’originalité de la composition à Sabatier. Pourtant, si Vagnat a probablement commencé son dessin d’après la lithographie, il est certain en revanche qu’il s’est bien rendu sur le motif pour l’achever. Il y a rajouté des éléments qui sont absents de la planche d’origine comme la végétation ayant envahi le rocher à gauche ou la pierre volumineuse qui s‘est détachée de la paroi à droite. La datation très précise du « 17 mai 1869 » vient appuyer cette hypothèse, car une copie servile d’après une estampe n’aurait aucune raison d’être datée si précisément. Il est plus probable que l’artiste a voulu confronter l’image publiée au réel et marquer ainsi dans son dessin le passage du temps sur ce site pittoresque. Car si les maisons médiévales suspendues n’ont guère changé en quinze ans, les rochers ont été entamés par l’érosion et la végétation a poussé. Dans un autre dessin, aussi conservé au musée de Grenoble, l’artiste reprendra une autre vue publiée dans les Voyages pittoresques : les Cuves à Sassenage (MG 2017-0-30), autre site particulièrement pittoresque des environs de Grenoble[2]. Les Gorges de la Bourne, près Pont-En-Royans ainsi que La Cascade de Sassenage deviendront en 1883 des peintures, avec un cadrage légèrement différent.


[1] Salon de 1880, n°3711. MG 735.
[2] Louis Vagnat, À Sassenage, MG 2017-0-30.

Découvrez également...