Tisch N° 5

Daniel SPOERRI
4 novembre 1968
70,3 x 70,3 x 16,5 cm
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix
Acquisition :
Achat en vente publique à l'Hôtel Drouot en 1987

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D’origine roumaine, Daniel Spoerri est un artiste qui, en 1960 à Paris, a pris part à l’émergence du mouvement des Nouveaux réalistes sous l’égide de Pierre Restany aux côtés de Jean Tinguely, Niki de Saint Phalle, Arman, Raymond Hains, Jacques Villeglé et François Dufrêne. Au sein de cette avant-garde qui a la réalité pour credo, l’artiste poursuit une démarche d’appropriation du réel à partir d’objets du quotidien. Sensible à la culture gastronomique au point de collectionner plus de mille ouvrages sur ce thème, Spoerri étend dès 1963 au champ culinaire sa critique de l’obsolescence des biens et des excès de la société de consommation, considérant l’acte de manger comme un élément-clé du processus de civilisation. Dans ce contexte, il intègre les reliefs de repas à ses « tableaux-pièges » dont le principe, inventé en 1959, consiste à présenter à la verticale des objets assemblés sur un plan horizontal.
Tisch n° 5, qui réunit sur un panneau bleu la vaisselle et les restes d’un déjeuner, se regarde comme une sorte d’autoportrait du repas consommé. Il s’agit là du fragment d’un banquet qui s’est déroulé le 4 novembre 1968 au restaurant Spoerri à Düsseldorf, qui comptait parmi ceux qu’à partir de 1963 l’artiste a ouverts de façon temporaire dans plusieurs villes européennes, des lieux prisés tant pour l’originalité de leur carte (omelettes de fourmis grillées…) que pour les performances gastronomiques qui s’y déroulaient, comme « les œufs sont faits, rien ne va plus », qui permettait de gagner un menu à base d’œufs. La composition de ce tableau-piège associe poétiquement le hasard au rituel de la convivialité : assiette, cendrier, verres, panière et autres petits objets flottent à la dérive sur la partie supérieure du support indigo comme autant de vaisseaux abandonnés. En redressant ensuite à 90° ce qui se trouvait à l’horizontale, l’artiste transforme la table en une forme de nature morte d’un genre nouveau qui témoigne de façon presque archéologique de ce qui fut consommé à un moment donné. Ce témoignage d’un temps suspendu illustre magistralement le souhait de l’artiste de bouleverser les frontières traditionnelles entre l’art et la vie en intégrant le public au processus même de création de l’œuvre d’art, ceci tout en interrogeant la place de l’alimentation dans notre culture.

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