Blooded

GILBERT & GEORGE
1983
330 x 252 x 1,2 cm
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix
Acquisition :
Achat à la Galerie Vega en 1987

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Exposition En Roue libre, 1er avril-3 juillet 2022

Salle 3

Intempestifs et grinçants

L’art moderne et les avant-gardes entendaient rompre avec la tradition et affirmer la liberté. Interpeler par le scandale et la provocation, fissurer les conformismes et combattre les codes, voilà qui permettait de faire table rase. Dans ce contexte, la place faite à l’humour et au grotesque semblait salvatrice.

Depuis les années 1980, la période contemporaine que l’on qualifie parfois de postmoderne serait plutôt l’ère du second degré. On y brille par son arrogance et par un certain cynisme. Machine de guerre contre les poncifs et le bon goût, ennemie des conventions, la création veille à développer le sens critique du regardeur, à le détourner des images véhiculées par les médias et l’univers du spectacle. Pour dénoncer les mécanismes du pouvoir et de l’oppression, brocarder l’institution artistique, tous les moyens sont bons : esprit caustique, bouffonnerie, humour potache, dérision et farce grotesque. Se moquer, c’est dire, c’est affirmer. Pour ces artistes railleurs maniant avec brio l’ironie et l’ambivalence, les parodies et les canulars, la désobéissance est reine. Par la mascarade et la mise à nu des subterfuges, on entend bien révéler la bêtise ambiante.

Chroniqueur prolifique des événements de son temps, Erró porte un regard critique sur la société et prend part aux conflits de son époque. Durant la Guerre froide, il confronte volontiers l’iconographie des sociétés capitalistes et communistes. D’une puissance d’expression stupéfiante, la peinture reste chez lui un espace de résistance pour la pensée. En proposant cette série énigmatique consacrée aux Chinois à Paris, Erró pervertit le régime courant des images offrant une image cryptée, imposant un nécessaire décodage, un déchiffrage mais surtout, il met au jour un nouveau genre de peinture d’Histoire.

Depuis 1968, soit depuis plus de cinquante ans, les Britanniques Gilbert and George, défenseurs d’un certain kitsch postmoderne exposent leurs corps réels puis photographiés pour dire la condition humaine et les absurdités contemporaines. Adoptant volontiers les figures du clown et du bouffon, ils s’attellent à critiquer l’idéologie artistique de leur temps marquée par l’art minimal et le formalisme. Les moindres gestes de leur existence sont prétexte à la création : marcher, manger, boire. Volontiers grinçants, ils affirment :« Nous sommes malsains, entre deux âges, scabreux, déprimés, cyniques, vides, las, minables, pourris, rêveurs, grossiers, insolents, arrogants, intellectuels, autocompatissants, honnêtes, victorieux, travailleurs, réfléchis artistiques, religieux, fascistes, sanguinaires, taquins, destructifs, ambitieux, pittoresques, damnés, obstinés, pervertis et bons. Nous sommes artistes. » (The World of Gilbert and George, film, 1980)

Un autre regard

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