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Antonio BALESTRA
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix

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Il est rare de pouvoir trouver sur un dessin des indications fiables précisant le nom du dessinateur, en l’occurrence le Véronais Antonio Balestra, et la destination finale des études qui y sont dessinées. Malheureusement l’identité de la personne qui les a écrites n’est pas connue. Tout ce que l’on peut dire est qu’il s’agit très certainement d’un amateur qui connut de près l’artiste. Le nom du Florentin Francesco Maria Niccolò Gabburi pourrait être avancé. On sait en effet que tous deux entretenaient une relation épistolaire mais l’écriture de ce dernier est différente.
Comme ces indications le soulignent, les études du recto et du verso préparent deux figures de moines, peintes dans un tableau d’autel par Balestra en 1725 pour l’église véronaise des frères mineurs observants de San Bernardino. Cette pala juxtapose en hauteur, et selon un mouvement ascensionnel en hélice, trois saints appartenant à l’ordre des Franciscains, comme le précise Balestra lui-même dans un texte autobiographique qu’il envoya à Pellegrino Orlandi : « Dans l’église de San Bernardino des padri Minori Osservanti, on voit une pala avec saint Pierre d’Alcantara, saint Jean de Capistran et saint Jacques de la Marche qui a été très appréciée par les connaisseurs ; elle a été gravée à l’eau-forte par son digne et estimé disciple, pour que sa valeur pût être comprise par tous à travers la gravure. » Le nom du graveur en question est Pietro Rotari et la gravure a été exécutée la même année que le dévoilement du tableau dans l’église, ce qui montre que Balestra donnait une très grande importance à la diffusion de son œuvre à travers un contrôle rigoureux de la qualité des gravures de reproduction qu’il faisait réaliser par des graveurs de son choix.
Balestra a étudié, sur le recto de la feuille, la figure de saint Jacques de la Marche qui occupe dans le tableau le premier plan. Le saint est tourné vers le spectateur-fidèle à qui il désigne un reliquaire qu’il tient de la main gauche. Cet objet est mis en réserve et repris à proximité pour une étude approfondie. Au verso de la feuille, Balestra a dessiné la figure de saint Pierre d’Alcantara. Peu de différences sont à noter entre les deux supports : les dispositions proposées sur les deux côtés de la feuille sont définitives puisqu’on les retrouve telles quelles sur le tableau. Un dessin d’ensemble, réunissant toutes les figures et précédant les études de détail, a dû exister. Balestra avait en effet l’habitude de penser sa composition en tenant compte de la forme même du tableau, qu’il matérialisait sur le papier par un cadrage constitué de traits réglés, cintrés par le haut et par le bas à oreilles, comme l’est le tableau peint pour l’église de San Bernardino. Un carton à l’échelle a certainement aussi été réalisé. D’autres dessins pour cette œuvre ont été retrouvés : pour la figure de l’ange tenant la croix[1] (qui est une citation d’un ange peint par Annibal Carrache dans un tableau aujourd’hui disparu et qui représentait Saint Grégoire priant pour les âmes du Purgatoire) et pour les mains de saint Pierre d’Alcantara (dans deux dessins[2]). Comme le laisse penser une annotation figurant sur le dessin étudiant la figure de l’ange (qui semble de la même écriture que celle du dessin de Grenoble), d’autres études ont existé, ce qui n’a rien d’exceptionnel vu l’importance de l’œuvre : « Seguono tutti li Studii di detta Pala » (« À la suite, tous les dessins de ce tableau »). Devait y figurer l’étude du saint intermédiaire, saint Jean de Capistran, étudié à coup sûr selon les mêmes caractéristiques stylistico-techniques, à la pierre noire rehaussée de craie blanche.


[1] Dessin passé en vente chez Christie’s New York, 11 janvier 1994, no 228.
[2] Le premier dessin est passé en vente chez Christie’s NewYork, 11 janvier 1994, no 229. Le deuxième est conservé au Kupferstichkabinett de Dresde, inv. n. C 1937-842. C’est sur le verso qu’est étudiée la main de saint Pierre d’Alcantara tenant la croix.

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