Femme agenouillée tenant un livre, à côté d'un vase : Marie-Madeleine

Giovanni MANNOZI dit Giovanni DA SAN GIOVANNI
XVIIe siècle
Pierre noire, sanguine, trait d'encadrement à la pierre noire sur papier vergé beige doublé, angle supérieur déchiré
14,6 x 11,3 cm
Crédit photographique :
VILLE DE GRENOBLE / MUSÉE DE GRENOBLE-J.L. LACROIX
Acquisition :
Legs de Léonce Mesnard en 1890, entré au musée en 1902 (lot 3551, n°1463)

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L’image est inattendue pour une figure de la Madeleine, titre traditionnel du dessin : une femme pudique, habillée d’une longue robe ordinaire, un fichu sur les épaules, un voile posé négligemment sur ses cheveux, dont une touffe rebelle s’échappe sans façons. Agenouillée à même le sol, sans doute sur un tapis rapidement indiqué par quelques traits de sanguine, elle tient un livre ouvert sur ses genoux : la main gauche, abandonnée sur la page (une grande main, comme en dessinent aussi Giovanni Bilivert ou Bartolomeo Salvestrini, autres dessinateurs florentins dont la sensibilité rejoint celle de Giovanni da San Giovanni), exprime un moment de suspension dans la lecture. Le petit visage est vu strictement de profil, mais l’inflexion du menton, légèrement redressé, traduit l’attention vers le ciel : simple moment de rêverie plutôt que contemplation mystique. Le vase posé à même le sol est l’élément qui, dans le contexte d’un artiste florentin des années 1620-1630, habitué à travailler pour les confréries et les paroisses, entraîne aussitôt une association à l’image de la Madeleine, dont le vase de parfums versés sur les pieds du Sauveur est le symbole incontournable. La subtilité du dessinateur n’est pas immédiatement perceptible. Le vase déborde du cadre fixé après coup par l’artiste, qui a rempli le fond de striures grises : fond neutre, qui ajoute à la simplicité de l’image, laquelle se veut naïve, quotidienne, en tout cas aux antipodes des représentations exaltées des Madeleines aux affects extrêmes, dont la peinture florentine s’est fait une spécialité (Furini, Pignoni). Au-delà de la représentation de la sainte, cette image de l’humilité a peut-être une portée symbolique, qui expliquerait son aspect insolite. Tout cela est raconté dans un espace cadré, lui-même défini à l’intérieur d’une feuille de très petites dimensions. Giovanni da San Giovanni rejoint ici les notations familières de Federico Zuccaro dans ses carnets de voyage, et l’usage savamment dosé de la pierre noire et de la sanguine contribue à cet apparentement. Avec d’autres moyens graphiques, il rejoint aussi l’esprit de Callot, observateur de la vie des gens ordinaires, dont il fut certainement proche. La finalité du dessin reste une question non résolue. Il pourrait s’agir d’une étude préparatoire à une petite scène latérale dans un décor de chapelle,mais la délimitation précise du cadrage évoque également l’idée de gravure, ou même de mise au net d’une idée plus libre.

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