Relief n°67

Antonino VIRDUZZO
1966
83,5 x 83,5 x 6,5 cm
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix
Acquisition :
Achat à une galerie
de Verneuil en 1968

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[Catalogue de l’exposition Italia moderna. La collection d’art moderne et contemporain italien du musée de Grenoble, 19 mai-4 juillet 2021]

Né à New York de parents siciliens revenus vivre, en 1932 dans leur île natale à Comiso, Antonino Virduzzo est une figure importante de l’art géométrique de l’après-guerre. Contre l’avis de sa famille qui l’imaginait entamer une carrière de médecin, il étudie d’abord la sculpture sur pierre en Sicile, puis se forme à la peinture à l’Accademia Albertina de Turin et suit enfin des cours de gravure à l’Académie des beaux-arts de Rome. Il retourne aux États-Unis en 1946. C’est à la Galerie Hugo à New York qu’Alexandre Jolas expose ses peintures proches de l’esthétique métaphysique et constructiviste de 1946 à 1949. Entre 1947 et 1949, Virduzzo travaille dans la marine marchande, effectuant des allers-retours entre l’Amérique et l’Europe, avant de revenir en Italie en 1949. Professeur à l’Académie des beaux-arts de Catane en Sicile, l’artiste promeut les échanges artistiques entre l’Italie et les États-Unis, défend l’art de son temps (Ernst, Burri). De 1952 à 1955, installé en France, il participe au Salon des réalités nouvelles, vit une période fondamentale pour son évolution personnelle, crée de nombreux vitraux ainsi que des peintures et des lithographies évoquant l’abstraction géométrique de Mondrian. C’est en 1957 que s’opère un véritable tournant dans son oeuvre. L’artiste jusqu’alors privilégiait la gravure. La superposition des planches lui offrait la possibilité d’affronter le problème de la complexité de la matière. Il obtient d’ailleurs, en 1962, le grand prix international de l’estampe à la XXXIe Biennale de Venise. C’est le perfectionnement de cette technique qui lui permet de voir naître et se développer parallèlement ses premières sculptures et ses premiers tableaux-reliefs, productions poursuivies jusqu’en 1973. Encouragé par Michel Seuphor, Virduzzo anticipe avec elles, à maints égards, ce que l’on appellera plus tard l’Op Art.

Entre 1965 et 1966, on trouve ainsi dans la production de Virduzzo des hexagones, des roues pivotantes, des disques cinétiques aux surfaces modulaires et vibrantes. Relief n° 67 (1966) appartient à ces créations alvéolaires faites de cartons creusés, constitués d’infimes cavités superposées et subtilement colorées. Dans ce tableau-relief, un losange fait d’ocelles en saillie s’intègre dans un disque peint sur une surface de forme carrée et perforée. Fait de carton compressé ou poinçonné, le relief donne un sentiment mêlé de légèreté par les perforations de sa surface, mais également d’extrême densité par la matière compacte de sa partie centrale. Faites de trouées et de protubérances, les formes géométriques – losange, cercle ou carré – donnent tantôt l’impression d’avancer, tantôt le sentiment de reculer. Les alvéoles de carton ont, qui plus est, en leur centre comme une pupille, une cavité accroissant ce phénomène. Toujours en quête d’un centre, Virduzzo, affirme Claude Fournet, depuis 20 ans, fait des points, des cercles, des ronds. Pour l’artiste, le cercle est en effet une figure idéale, d’harmonie et de perfection. Reliant l’infiniment grand et l’infiniment petit, il évoque l’origine et la fin. Jouant avec la matière, sa surface rugueuse, l’artiste semble en outre, comme Lucio Fontana ou Enrico Castellani, exprimer, à travers ses choix formels, une aspiration à l’absolu. « Comme si de cette superposition des mondes contradictoires, l’artiste faisait affleurer des profondeurs un ordre cosmique encore inaccessible » (Jacques Lassaigne, 1964). Virduzzo fait donc advenir un constructivisme d’un type nouveau, mâtiné de primitivisme, où des différentes strates de la matière semblent émerger des forces originelles et inconscientes. En 1965, l’artiste participe à l’exposition Mouvement II organisée par Denise René dans sa galerie parisienne. À partir de 1967, il travaille à l’intégration de son oeuvre dans l’espace public, créant des sculptures monumentales dans quelques universités italiennes. Le début des années 1970 marque sa consécration en Italie comme en France (rétrospective de son oeuvre sous les auspices du président de la République italienne, 1971 ; numéro entier de la revue Ellegi consacré à ses travaux, 1972 ; exposition au musée des Sables-d’Olonne, 1976).

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