La peinture d'histoire au XIXe siècle
Le XIXe est le siècle des paradoxes où se côtoient les tendances les plus novatrices et les retours permanents vers les formes du passé, où s’exprime la nostalgie de l’Antiquité, du Moyen Âge et de la Renaissance parfois de manière réaliste, précise et appliquée.
Des différents courants qui le traversent, le musée de Grenoble présente un panorama riche et varié. La peinture d’histoire dans la collection XIXe du musée se partage entre l’art troubadour, le romantisme et l’académisme.
Dans la première moitié du siècle, les peintres « troubadours » répondent au goût du public pour l’histoire et les décors médiévaux. Brouillant les frontières avec la peinture de genre, ils privilégient l’anecdote, dans des compositions détaillées et de petits formats.
Le romantisme s’empare quant à lui de sujets ambitieux, s’inspirant de la mythologie, de la littérature romanesque ou de l’histoire contemporaine.
La peinture académique, dite « art officiel », offre d’imposantes « machines » qui ont fait les grandes heures du Salon entre 1840 et 1880. Empruntées à l’histoire biblique ou à la mythologie antique, dans lesquelles le souffle épique se combine à la précision archéologique, ces œuvres passaient directement des cimaises du concours parisien à celles des musées, au décor des mairies, préfectures et autres institutions publiques françaises, florissantes au XIXe siècle.
-
Gutenberg inventant l'imprimerie
Médium :
Auteur : Jean-Antoine LAURENT
Date : 1831
Dimension : 98 x 79 cm
Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
Acquisition : Achat à la galerie Aaron Terrades en 1992
Localisation : SA15 - Salle 15Jean-Antoine Laurent est un peintre majeur du mouvement « troubadour ». Dans ce tableau inspiré de la peinture hollandaise du XVIIe, il associe les éléments d’une architecture médiévale à un mobilier découpé en ogive et reproduit les détails minutieux des équerres, compas, lutrin, étoffes et papiers.
Ce sujet répond au goût du XIXe siècle pour l’histoire et permet à l’artiste d’évoquer de façon anecdotique et poétique l’une des découvertes majeure de l’époque moderne. Gutenberg, tel un mage mystérieux, vêtu d’une ample tunique mauve agrémentée de fourrure, est assis à sa table de travail et compose une chaîne de caractères en plomb, le regard concentré sur ses mains lumineuses.
-
Arrestation de Charlotte Corday en 1793
Médium :
Auteur : Henry SCHEFFER
Date : 1830
Dimension : 130 x 163 cm
Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
Acquisition : Dépôt du Musée du Louvre en 1892
Localisation : SA16 - Salle 16Salle 16
Henry Scheffer, comme son frère Ary, est peintre officiel de Louis-Philippe. Ce tableau est réalisé en 1830, trente-sept ans après la mort de Marat, et alors que la monarchie de Charles X commence à vaciller. Il montre Charlotte Corday arrêtée, impassible en dépit de l’activité des sans-culottes qui l’entourent et de la présence agressive du chien. Dans cette jeune femme brune à la peau diaphane, rien ne laisse présager la criminelle qui mit fin aux jours de l’« Ami du peuple » dont le corps immobile se devine dans la pénombre, en arrière plan sur la droite. L’artiste évoque ici la fascination qu’exerça la meurtrière comme archétype de l’héroïne d’un monde encore incertain politiquement.
-
Roger délivrant Angélique
Médium :
Auteur : Eugène DELACROIX
Date : vers 1855 - 1858
Dimension : 46 x 55 cm
Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
Acquisition : Achat à la vente de la Collection Arosa du 24 avril 1858
Localisation : SA16 - Salle 16Le sujet de ce tableau de Delacroix, chef de file du romantisme, a d’abord été identifié comme un saint Georges, puis assimilé à un épisode du Roland Furieux de l’Arioste, roman écrit en 1502.
Roger chevauchant un cheval vient au secours de la belle Angélique, captive et à demi-nue, en tuant le monstre marin qui la menace. La manière esquissée tout comme les touches virevoltantes, s’accordent aux flots déchaînés. Malade, assombri par la vieillesse mais soucieux d’assurer son immortalité à travers son œuvre, l’artiste reprend dans cette composition certains de ses motifs privilégiés. La peinture est une réplique de l’œuvre du musée du Louvre, Saint Georges combattant le dragon (1847).
-
L'Echelle de Jacob
Médium :
Auteur : Alexandre LAEMLEIN
Date : 1847
Dimension : 455 x 325 cm
Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
Acquisition : Achat par l'Etat en 1871.
Dépôt au Musée de Grenoble en 1875.
Localisation : SA17 - Salle 17D’origine allemande, le peintre Laemlein emprunte ses thèmes à l’histoire religieuse et à la mythologie.
Dans ce grand tableau, le peintre raconte l’épisode de la Genèse dans laquelle le patriarche Jacob, fuyant son frère Ésaü, s’est endormi et rêve qu’une échelle relie la terre au ciel et que Dieu, environné d’anges, en descend les marches. Fidèle au texte, Laemlein met l’accent sur la figures de Jacob, couché au premier plan dans une posture inspirée du Caravage, et celle de Dieu au centre de la composition. Les anges aux poses maniérées, les couleurs douces, la distribution de la lumière et le paysage romantique se combinent pour créer une atmosphère dramatique et irréelle.
-
Hercule et Lichas
Médium :
Auteur : Jean-Baptiste MAUZAISSE
Date : 1822
Dimension : 325 x 272 cm
Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
Acquisition : Achat par commande à l'artiste en 1818
Centre national des arts plastiques
Dépôt au Musée de Grenoble en 1822
Localisation : SA17 - Salle 17Mauzaisse, formé à l’École des Beaux-Arts, a reçu de nombreuses commandes de l’État dont ce tableau inspiré des Métamorphoses d’Ovide. Alors qu’il s’apprête à offrir en sacrifice les restes du lion de Némée, Hercule ressent les premières souffrances dues au sang empoisonné imprégnant la tunique que Déjanire, son épouse jalouse, a confiée au jeune Lycas. Sous l’emprise de la colère et de la douleur, il jette le jeune innocent dans la mer d’Eubée, avec une force décuplée par le sentiment de la trahison. Dans cette composition spectaculaire et violemment animée, les corps des deux protagonistes, éclairés par une lumière crue, se détachent avec vigueur sur un fond de paysage largement brossé.
-
Homère mendiant
Médium :
Auteur : Jean Jules Antoine LECOMTE DU NOUŸ
Date : 1881
Dimension : 236,5 x 174 cm
Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
Acquisition : Don de l'artiste en 1891
Localisation : SA17 - Salle 17Lecomte du Nouÿ incarne l’art académique qui fleurit au Salon dans la seconde moitié du XIXe siècle. Dans ce triptyque il mêle précision archéologique et réalisme quasi photographique à une composition pleine d’emphase .
Homère, sous les traits d’un vieillard aveugle, est guidé par un enfant aux portes d’Athènes surplombée de son Acropole. De part et d’autre de la scène, l’artiste illustre L’Odyssée à gauche et L’Iliade à droite. Pénélope tient le portrait d’Ulysse, à ses pieds la quenouille évoque sa fameuse tapisserie et le chien symbolise la fidélité conjugale. Dans la partie réservée à L’Iliade, le cadavre d’Hector est étendu sur les marches du trône de Troie. Les deux colonnes doriques du cadre ornemental partagent le récit en trois tableaux distincts.
-
Un mobile tué; un officier allemand mort prés de son cheval expirant (fragment du Panorama de la bataille de Champigny)
Médium :
Auteur : Jean Baptiste Edouard DETAILLE
Date : 1882
Dimension : 104 x 264 cm
Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
Acquisition : Don de Léon de Beylié en 1896
Localisation : SA17 - Salle 17Engagé dans la guerre de 1870, Detaille se spécialise à son retour dans des peintures où sont décrites, d’après modèles vivants ou photographies, les actions héroïques de l’armée française et la vie des soldats.
Ce tableau au format allongé est le fragment d’un panorama peint entre 1880 et 1882, dispersé en soixante-cinq morceaux. Il mesurait 120 mètres de long sur 15 mètres de haut, plongeant le visiteur au cœur d’un « environnement » sans limites. Désormais, le cadrage serré, photographique, des corps abandonnés dans la neige évoque la mort anonyme de milliers de soldats tombés au combat.
-
L'Anniversaire
Médium :
Auteur : Henri FANTIN-LATOUR
Date : 1876
Dimension : 220 x 170 cm
Crédit : Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. LacroixDomaine public
Acquisition : Achat en 1900 avec la participation de la Société des Amis des Arts.
Localisation : SA22 - Salle 22Salle 22
En 1875, Henri Fantin-Latour entreprend L’Anniversaire en hommage à son compatriote de La Côte-Saint-André, Hector Berlioz, décédé six ans plus tôt.
La scène se situe devant un tombeau de marbre inspiré de l’architecture classique. Les figures représentées incarnent des personnages issus des œuvres musicales du compositeur, inscrites sur un rouleau tenu par Clio, muse de l’Histoire. Un ange pour l’oratorio de l’Enfance du Christ, La Musique en pleurs, Marguerite de La Damnation de Faust, Didon des Troyens, Juliette en robe de bal, Roméo à ses côtés se partagent la composition. Vu de dos, une couronne à la main, Fantin se représente en « homme moderne ».