Petit vase à décor floral

Asie, Japon
XIXe siècle
hauteur: 12,5 cm
diamètre: 8 cm
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix
Acquisition :
Don de Léon de Beylié en 1899

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Non signé
Nagoya, dans le style de la Cie Andô
Japon, ère Meiji (1868-1912), v. 1900
Émaux cloisonnés (yûsen) sur cuivre ; cuivre argenté
12,5 × 8 cm
MG 2007-0-366/MG 2007-0-367

[Notice commune aux MG 2007-0-371 , MG 2007-0-366, MG 2007-0-367, MG 2007-0-362 , MG 2007-0-363 , MG 2007-0-364 et MG 2007-0-365 .]

Après des débuts timides pendant l’époque Edo (1603-1868) et surtout à partir de 1837[2], la production d’émaux cloisonnés japonais, appelés shippô ou shippô-yaki, connaît un incroyable essor pendant la période Meiji (1868-1912). Ce développement s’explique par l’engouement des Occidentaux pour les objets japonais dès l’ouverture forcée du Japon en 1853[3]. Les émaux cloisonnés japonais fascinent par leur technique délicate et minutieuse et leur exportation débute dès les années 1860. L’apogée esthétique et technologique de leur production se situe entre 1880 et 1910. La diffusion se fait essentiellement par le biais des expositions universelles et d’autres expositions non officielles tant au Japon qu’en Europe. À Londres, par exemple, un village japonais est créé entre 1885 et 1887[4]. Parmi les productions artistiques et manufacturées du Japon, celle des émaux cloisonnés modernes est l’une de celles qui rencontrent le plus grand succès en Occident à la fin du XIXe siècle. Il faut attendre le début du XXe siècle pour voir les Japonais s’y intéresser.
Des ateliers existent dans les villes de Nagoya, Kyôto et Tôkyô. De nombreux ateliers se sont installés dans le village de Tôshima, également connu sous le nom de shippô-mura (« village des émaux cloisonnés ») à proximité de Nagoya. Ce village va fournir jusqu’à 70% de la production japonaise. Contrairement à la Chine où la production d’émaux reste anonyme, au Japon, de nombreuses pièces sont signées du nom de l’artiste ou de celui de l’atelier de fabrication. Citons quelques noms parmi les plus célèbres : Namikawa Yasuyuki à Kyôto, Hayashi Kodenji et la Cie Andô à Nagoya et Namikawa Sôsuke à Tôkyô. La demande du marché occidental est telle qu’à partir de 1896 la surproduction d’émaux entraîne une baisse de la qualité visible dans une partie des pièces non signées.
La collection du général de Beylié comporte dix-sept objets émaillés (cloisonnés, peints et champlevés) dont huit sont japonais. Un vase couvert à deux anses et son plat décoré de dragons [MG 2007-0-365 et MG 2007-0-364 ] dans les médaillons auraient pu être achetés à Kyôto lors de son passage en mai 1886, car leur style rappelle celui de Namikawa Yasuyuki. En revanche, les autres pièces de la collection semblent être plus tardives par leur style, mais aussi par les techniques shôsen et yûsen utilisées et ont pu être achetées à l’Exposition universelle de Paris en 1900. La technique shôsen (« peu de cloisons ») consiste à limiter l’usage des cloisons quand la technique yûsen (« sans cloison ») permet de produire des parties du décor (les fonds) ou des décors entiers sans cloison, reproduisant ainsi en émail des peintures à l’encre. À partir de 1890, dragons et phénix se raréfient au profit des fleurs, des oiseaux, des papillons qui envahissent les parois des vases, des plats dans des compositions très naturalistes proches de l’Art nouveau.
Les premiers émaux japonais entrent dans les collections occidentales privées et publiques dès les années 1860[5].


[1] L’auteur tient à remercier tout particulièrement Mme Momoko Welch, assistante de conservation au département asiatique du Phoenix Art Museum (Arizona, États-Unis), pour la traduction des quatre caractères lisibles de l’étiquette. « Satô » est un nom de famille, mais pas celui d’un artisan. Serait-il lié à une vente aux enchères ? L’auteur tient également à remercier M. Waynor Rogers, collectionneur américain d’émaux cloisonnés japonais pour les échanges qu’ils ont pu avoir au sujet des datations de ces pièces et, plus largement, pour le partage généreux de sa connaissance des émaux japonais.
[2] Si la majorité des auteurs s’accordent à dire que les émaux cloisonnés commencent à être produits en 1837, d’autres attribuent quelques objets au XVIIIe siècle. L’ouvrage de Gregory Irvine, Japanese Cloisonné, publié en 2006 par le Victoria & Albert Museum de Londres fait une excellente synthèse, entre autres, sur ce point.
[3] L’amiral américain Perry entre dans le port de Yokohama et force l’interdiction d’entrée au Japon déclarée par le gouvernement de Edô en 1641. Depuis lors, seuls les bateaux de commerce chinois et hollandais avaient accès au port de Nagasaki. À partir de 1859 le port de Yokohama est ouvert au commerce international. Après plus de deux siècles d’isolement, le Japon s’ouvre au monde avec l’ère Meiji.
[4] Un atelier de cloisonnés était installé dans ce village à vocation purement commerciale situé près de Knightsbridge Green. Cf. The Illustrated London News, 21 février 1885.
[5] En Angleterre notamment, où Sir Rutherford Alcock, l’un des premiers diplomates anglais au Japon, présente sa collection d’objets japonais à l’Exposition universelle de 1862 à Londres. Le Victoria & Albert Museum de Londres achète (pour le prix de 24 £) un premier cloisonné japonais à l’Exposition universelle de Paris en 1867.

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