Etude de saules

François BOUCHER
vers 1740
26,9 x 36 cm
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix
Acquisition :
Legs de Léonce Mesnard en 1890, entré au musée en 1902 (dessins devant être exposés sur des cadres tournant autour d'un pivot, n°75).

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Ces grands arbres, aux silhouettes asymétriques et dont les branches traversent en tous sens la composition, pourraient paraître comme une étude naturaliste d’un motif pittoresque, dessiné sur le motif. Cependant, l’artifice se dévoile à mesure que l’on s’attarde sur le détail de la forme végétale : la recherche de l’effet séduisant du trait de sanguine semble l’emporter, dans l’intention de l’artiste, sur la vraisemblance d’une description botanique. La nature est ici réinventée, perpétuellement recréée par l’imagination de François Boucher, avec une ambiguïté qui rappelle ses créations plus tardives sur des sujets champêtres.
Dans ce type d’œuvre, Boucher s’inspire principalement du travail d’autres artistes, en particulier des études de paysages de Watteau, qu’il connaissait intimement pour en avoir gravé un grand nombre dans sa jeunesse. La feuille du musée de Grenoble a d’ailleurs été autrefois attribuée à Antoine Watteau.
Si cette étude évoque les silhouettes pittoresques des arbres placés au centre d’un Paysage pastoral, exécuté par Boucher vers 1738 pour un dessus-de-porte de l’Hôtel de Soubise , elle ne semble pas avoir été utilisée directement par Boucher pour une composition peinte : il s’agit plutôt d’un exercice de style admirablement conduit, un délice de courbes et de hachures à destination d’un collectionneur amateur. L’artiste fit d’ailleurs commerce de ce type de dessin jusque vers le milieu du siècle.
Le dessin de Grenoble, qui date probablement ainsi du début de la carrière de l’artiste, vers 1740, est proche également d’une très belle feuille de même sujet conservée à l’École nationale supérieure des beaux-arts à Paris[1]. La sanguine de Grenoble est d’une composition aussi spectaculaire, bien que la pâleur de son trait trahisse la contre-épreuve. On peut également rapprocher cette feuille d’un autre dessin, Berger poussant son troupeau (Paris, Bibliothèque nationale de France), que Pierre Rosenberg avait publié naguère sous le nom de François Boucher, dans un essai consacré à la jeunesse de l’artiste dans le catalogue de l’exposition de 1986 (New York-Detroit-Paris) . Les deux arbres visibles sur ce dernier dessin évoquent assez directement par la souplesse de leur ligne et la liberté de forme les grands saules du dessin de Grenoble.


[1] François Boucher, Etude de saules, Paris, Ecole nationale supérieure des beaux-arts, PM 1199.

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