Etude de tête pour Saint Louis

Charles-Joseph NATOIRE
XVIIIe siècle
Pierre noire, sanguine, rehauts de craie blanche sur papier vergé chamois
26,2 x 21,9 cm
Crédit photographique :
VILLE DE GRENOBLE / MUSÉE DE GRENOBLE-J.L. LACROIX
Acquisition :
Mode et date d'entrée inconnus (probablement collection L. Mesnard).

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Classé parmi les anonymes français du XVIIIe siècle et inventorié comme « une tête de jeune fille », ce dessin est en réalité une étude pour le personnage de saint Louis dont Natoire représente l’Apothéose dans une fresque monumentale, sur la voûte de l’église Saint-Louis-des-Français à Rome.
En 1751, alors que l’on dévoile à Paris l’extraordinaire décor peint de la chapelle des Enfants-Trouvés, chef d’œuvre aujourd’hui détruit de Natoire, ce dernier quitte la France pour prendre la succession de Jean-François de Troy en tant que directeur de l’Académie de France à Rome. Dans la Ville éternelle, où il passera tout le reste de sa carrière, l’activité de Natoire se partage entre la formation des élèves et l’exécution de travaux personnels, en grande partie destinés à sa clientèle française.
L’arrivée de Natoire à Rome coïncide avec les travaux d’achèvement de l’un des plus importants chantiers religieux de la ville, celui de l’église Saint-Louis-des-Français. En 1754, alors que s’achève la réfection de la nef, se pose la question de son décor peint qui sera confié à Natoire. Un premier projet, dont l’artiste fait état dans sa correspondance[1] , est approuvé par le cardinal de La Rochefoucaud. Quelques mois plus tard, l’œuvre est exécutée à fresque par le peintre italien Antonio Bicchierai, d’après un carton à grandeur fourni par Natoire qui achève parallèlement les cartons de tapisserie pour L’Histoire de Marc-Antoine (Nîmes, musée des beaux-arts).
Le sujet de la voûte toile est décrit au marquis de Marigny par l’artiste : « Elle représente la mort de saint Louis à Tunis dans son camp. Son âme s’envole au ciel soutenue de la Religion, qui la présente a Dieu le fils, accompagné de ses vertus. La France, qui est en bas, exprime allégoriquement l’affliction de cette mort, aussi bien qu’un guerrier qui porte l’étendard de l’oriflamme, et dans le lointain, on voit des malades et mourants. Un ange fait voir, étant appuyé sur son cercueil, la couronne d’épine que ce saint Roy a porté en France[2] » .
Nous conservons aujourd’hui une esquisse peinte et deux dessins d’ensemble en rapport avec ce décor. Parmi ces trois œuvres, le tableau du musée de Brest[3] , plus esquissé que les dessins, est probablement le premier dans l’ordre d’exécution. Suivent de près les dessins aquarellés de Waddesdon Manor[4] et du musée de Gray. Pour la figure de saint Louis, à laquelle se rapporte l’étude de Grenoble, Susanna Caviglia recense un dessin d’ensemble montrant, selon la tradition académique, le personnage nu (Paris, musée du Louvre[5]) et une autre étude de tête à la sanguine acquise en 2003 par le musée de Tournus[6] . Par rapport à cette dernière, l’étude de Grenoble se montre plus attentive au modelé, dont les carnations sont délicatement mises en place grâce à l’utilisation des trois crayons : la chevelure et la barbe sont rendues avec la pierre noire alors que la sanguine et la craie blanche composent le relief du visage et soulignent le regard[7] .


[1] Lettre à Marigny en décembre 1755, Correspondance des directeurs ..., vol. 11, p.150.
[2] Correspondance des directeurs..., vol. XI, p.116.
[3] L’Apothéose de saint Louis, H/T, H. 70 ; L. 36, Brest, musée des beaux-arts, Inv. 67-1-1.
[4] L’Apothéose de saint Louis, Waddesdon Manor, cat. 2006, Laing, p. 328-338.
[5] Paris, musée du Louvre, INV 31404.
[6] Sanguine traitée à l’estompe, légèrement rehaussée de craie blanche, H. 33 ; L. 23.5. Tournus, musée Greuze, Inv. 2003.2.2.
[7] Un certains nombre de dessins du musée ont porté jadis, ou encore aujourd’hui, une attribution à Natoire. Hormis ceux que nous avons cités dans les notices précédentes, signalons une Tête de femme à la pierre noire, rehaussée de craie blanche (MG D 857), actuellement classée à François Boucher, qui semble devoir être rapproché de Natoire (copie d’après ?). Les autres feuilles, de styles très variés, sont définitivement à écarter de l’œuvre de l’artiste.

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