Communion de sainte Marie Madeleine

Camillo PROCACCINI (attribué à)
XVIe siècle
Sanguine, mise au carreau à la sanguine en superposition, sur papier vergé beige
20 x 14,3 cm
Crédit photographique :
VILLE DE GRENOBLE / MUSÉE DE GRENOBLE-J.L. LACROIX
Acquisition :
Legs de Léonce Mesnard en 1890, entré au musée en 1902 (lot 3544, n°1343).

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La manière de dessiner de Camillo Procaccini, un peu lourde et prudente, son habitude, très évidente ici, de balayer le papier de manière assez uniforme, à l’aide de la pierre naturelle (la sanguine dans le cas présent), peu appuyée, sa prédilection pour des compositions à sujet religieux bien mesurées et des figures robustes, empreintes d’un pathétisme religieux retenu, sont bien les traits dominants de cette étude, rendue à l’artiste lombard par N. Schwed (communication orale).
L’attribution ancienne à Girolamo Muziano (1532-1592) n’est pas absurde, puisque ces deux artistes appartiennent au même courant de la peinture religieuse militante de la fin du XVIe siècle. Muziano a peint à de nombreuses reprises le thème de saint François en extase, immergé dans la nature, dans des termes repris ici par Procaccini pour la Madeleine. Cependant l’indication un peu vide du paysage est peu compatible avec l’expression graphique de Muziano, excellent paysagiste. De plus, Muziano, d’une génération précédente, n’a jamais dessiné de cette manière et la confusion avec Camillo Procaccini résulte d’une perception superficielle d’une image récurrente de la Contre-Réforme. On note, à titre d’exemple, que la figure de Marie Madeleine est conçue comme celle du bienheureux Pie V, dans le tableau d’autel peint par Camillo Procaccini pour l’église San Domenico de Crémone, en 1606, Vierge avec l’Enfant adorée par saint Dominique et le bienheureux Pie V (Isola Dovarese, église paroissiale).
Malgré son manque de spontanéité et l’absence d’une vibration des lignes qui caractérisent habituellement les dessins de Camillo, il n’y a sans doute pas lieu de contester l’originalité de cette étude finie, ne serait-ce qu’en raison de la mise aux carreaux, qui correspond à une méthode de travail habituelle à l’artiste. On la retrouve sur deux autres dessins, également à la sanguine : MG D 1987 et MG D 508 . On ne rencontre cependant pas le sujet de la Madeleine pénitente dans ses œuvres peintes ou dessinées, bien étudiées par N. W. Neilson, et, plus récemment, à l’occasion de l’exposition de Rancate[1], alors que celui de la Stigmatisation de saint François a donné lieu à une large diffusion, grâce à la gravure par Giusto Sadeler (Anvers, 1583 – Venise, 1620). De nombreux articles ont également été consacrés à ce dessinateur, dont beaucoup d’exemples nous sont parvenus. Le noyau le plus important se trouve à Milan (Biblioteca Ambrosiana, Castello Sforzesco, Arcivescovado, Accademia di Brera), d’où rayonna son activité à travers la Lombardie. Les dessins de Camillo rencontrèrent très tôt, au tout début du XVIIe siècle, un vif succès auprès des collectionneurs milanais, comme le prouvent les lettres de Gerolamo Borsiere où il est mentionné comme « maestro de’moderni dissegnatori ». Il est difficile de dater notre dessin, qui ne présente aucune saillie, ni technique, ni iconographique, mais on pense plutôt à son style des années de maturité, voire de la fin de sa carrière, en pleine propagation du baroque en Lombardie.


[1] Il a été établi à cette occasion que Camillo Procaccini, fils de Ercole Procaccini et frère aîné de Giulio Cesare, comme on le sait, était né en 1661 à Parme et non à Bologne.

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