Tête d'homme vue de trois quarts dos

Federico BAROCCI
XVIe siècle
Pierre noire, sanguine, rehauts de craie blanche sur papier bleu de forme ovale
21,2 x 16,4 cm
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix
Acquisition :
Legs de Léonce Mesnard en 1890, entré au musée en 1902 (lot 3544, n°1238).

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Ce dessin appartient au dossier génétique d’une peinture de Federico Barocci représentant la Nativité, aujourd’hui conservée au Museo del Prado à Madrid. Cette peinture fut commandée peu avant 1597 par le duc d’Urbin, Francesco Maria II della Rovere, qui l’offrit à la reine d’Espagne en 1604, Marguerite d’Autriche, épouse de Philippe III. La reine plaça l’œuvre peinte sur l’autel de sa chapelle privée. Bellori, biographe du peintre, en donne une description assez précise : « On voit la Vierge s’agenouillant pour adorer le nouveau-né qui se dresse dans une mangeoire ; pendant ce temps, derrière, saint Joseph ouvre la porte de l’étable aux bergers dont l’entrée dans la lumière est du plus bel effet. » Les termes de cette courte description permettent de comprendre que Barocci a disposé l’invention de la Nativité de manière fort originale. L’étable y est figurée comme un espace fermé, alors que les dispositifs iconographiques classiques de ce sujet montrent d’ordinaire un lieu ouvert sur l’extérieur et une présence effective des bergers, assortie de théories d’anges volant dans les airs ou se mêlant à la foule des pasteurs. De ce fait, l’historia représentée prend l’allure d’une scène de genre, à ceci près que Barocci respecte les convenances, en représentant la Vierge et saint Joseph vêtus de drapés, vêtements qui permettent de ne pas confondre la famille de l’enfant Jésus avec de vulgaires paysans.
Comme à son habitude, Barocci a pris soin d’étudier minutieusement l’ordonnance du sujet et les figures qui le composent à travers une série de dessins. Quarante sont recensés. Toutes les phases préparatoires ne sont pas représentées. Manquent ainsi le carton final, les cartons auxiliaires des têtes au pastel ou à l’huile, les cartoncini des couleurs et du clair-obscur (réalisés à la plume et à l’encre brune, mêlée de lavis et de gouache ou à l’huile) permettant de servir de modèles dans l’établissement des tonalités et des contrastes de valeurs. Une première pensée à la plume et à l’encre brune [1], que Barocci appelait dans son propre jargon un scarpino (escarpin), constitue la matrice dispositionnelle du sujet ; une étude plus poussée graticulée [2] se rapproche de la disposition finale. Les autres études sont des études de figures se rapportant à la Vierge, saint Joseph, l’enfant Jésus, aux bergers, à la vache sise à senestre dans le tableau ; des études de mains, de bras, de têtes, de draperies sont aussi conservées.
Le dessin de Grenoble prépare le profil perdu de saint Joseph en train d’ouvrir la porte aux bergers. Le cabinet des dessins des Offices conserve un autre dessin préparatoire à cette tête [3]. Il est réalisé dans les mêmes termes techniques, à la pierre noire, à la sanguine et à la craie blanche sur un type de papier similaire de couleur bleue. Ses dimensions sont bien plus importantes que celles du musée de Grenoble puisqu’il mesure 40,5 x 28,2 cm. Il est cependant à penser que ce dernier devait être à l’origine de même format. Peut-être a-t-il été mis en ovale afin d’éliminer les parties abîmées et déchirées du papier d’œuvre. Quant à leur chronologie respective exacte au sein du dossier génétique, il semblerait que le dessin des Offices précède celui de Grenoble. L’absence de repentirs au niveau du profil de l’exemplaire grenoblois pourrait accréditer cette hypothèse. Ces dessins de têtes appartiennent à un stade de préparation intermédiaire entre le scarpino et le dessin de la mise en place quasi définitive de la composition, précédant les cartoncini. Leur caractère sommaire et schématique expliquant qu’ils ne puissent être des cartons auxiliaires aidant à la réalisation des motifs peints. Ce sont tout simplement des études de têtes, sorte de close-up graphiques, comme il existe pour la même figure des études de sa main gauche désignant l’Enfant Jésus aux bergers.


[1] Florence, Offices, inv. 11485 F r°
[2] Florence, Offices, inv. 11432 F
[3] Florence, Offices, inv. 11276 F

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