Cinq doigts

[Cartel de l’exposition De Picasso à Warhol - Une décennie d’acquisitions, musée de Grenoble, 7 mai- 31 août 2015]

À la faveur du retour à la peinture figurative placée en Italie sous le label de La Trans-Avant-Garde, Mario Merz recommence à peindre en 1977. Il privilégie alors des toiles libres de grand format. Ses thèmes de prédilection sont le monde animal, les éléments d’architecture et les fragments du corps, ici une main rouge accompagnée de la suite numérique de Fibonacci, leitmotiv dans la production de Mario Merz.
Sur un fond vert clair, se dresse, tels cinq pics montagneux, cinq doigts bleu marine peints à larges coups de brosse, sur lesquels l’artiste a fait couler un rose tyrien rehaussé de quelques touches de vermillon. L’ effet est saisissant et donne à cette image la dynamique d’un surgissement, d’une apparition soudaine. C’est une main dressée, celle d’un accoucheur de formes, toute ruisselante encore d’une matière vitale qui donne chair à des visions mentales. L’ artiste a ajouté au sommet de chaque doigt le début de la suite numérique de Fibonacci, une suite mise au point par un moine italien, Léonard de Pise, dit Fibonacci, en 1202, dans laquelle chaque nombre est la somme des deux qui le précèdent, ce qui génère une progression exponentielle, à l’infini. On peut ainsi voir dans cette main, associée à la suite de Fibonacci, une allégorie du geste artistique qui peut engendrer par la seule manipulation des formes une infinité d’univers.

L’œuvre de Mario Merz est maintenant bien représentée au musée de Grenoble avec une installation et deux peintures. Cinq doigts offre un aperçu du travail peint de Merz dans la deuxième partie de sa carrière, à partir de 1977, alors que Sans titre (1960) permet de comprendre ses débuts en peinture (1945-1965), une période moins connue et peu présente dans les collections publiques françaises.