Ruines romaines

Bartholomeus BREENBERGH
vers 1629
Lavis d'encres brune et grise sur dessin sous-jacent à la pierre noire, trait d'encadrement à la plume et à l'encre brune sur papier vergé crème
15 x 21,2 cm
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix
Acquisition :
Legs de M. Léonce Mesnard en 1890, entré au musée en 1902 (Lot 3548, n°1754)

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Les rapports entre Breenbergh et la France valent que l’on s’y attarde car l’artiste y jouit d’une immense réputation au XVIIIe siècle et ses oeuvres se trouvent dans les collections les plus réputées. L’artiste est en effet depuis toujours très apprécié en France comme le montrent les nombreuses mentions dans les anciens catalogues de vente. C’est peut-être sa parenté stylistique avec son ami Claude Lorrain qui explique cette présence dans les collections françaises. Au début de leurs carrières, à Rome dans les années 1620, Breenbergh et Claude Lorrain sont proches, et cela est très sensible dans leur manière de dessiner. En 1881, Havard constate la dépréciation de son oeuvre au cours du XIXe siècle. L’artiste tombe alors presque totalement dans l’oubli, situation propice à l’acquisition, par Mesnard, d’une impressionnante série de dessins de Breenbergh : « Pendant que les peintres au faire large et puissant, aux empâtements solides, reprenaient le dessus, la vogue se détournait des peintures minces et lisses[1]. »
Dès le milieu des années 1620, Breenbergh et Cornelis van Poelenburgh sont célèbres pour leurs dessins, dans lesquels ils se montrent sensibles à la lumière italienne. Selon le témoignage de Sandrart, ils sillonnent ensemble, accompagnés de Claude Lorrain, Rome et ses environs, pour dessiner d’après nature. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, les dessins de Breenbergh sont avidement recherchés par les collectionneurs et impressionnent par leur liberté de touche et par une utilisation spontanée et variée du lavis pour jouer sur les contrastes d’ombre et de lumière. Les ruines de la feuille de Grenoble, présentant de savants accents de clair-obscur, représentent certainement un monument dessiné par Breenbergh lors de ses promenades romaines. Rehaussé de lavis, le dessin a été peut-être achevé dans l’atelier. S’agit-il de vestiges vus sur le Palatin, où se trouvent les immenses palais impériaux ? En tout cas, ce monument n’existe plus aujourd’hui et nous ignorons s’il a été représenté par d’autres artistes. Breenbergh a dessiné ces ruines entre 1625 et 1630, au début du pontificat d’Urbain VIII Barberini. La célèbre phrase, courante à l’époque, « ce que n’ont pas fait les Barbares, les Barberini l’ont fait », montre à quel point Rome a été transformée par ce pape poète en digne capitale de la chrétienté par une destruction presque inévitable d’innombrables ruines antiques. Ces destructions permettent également d’obtenir de la chaux : de nombreux fours sont construits à cette occasion et ont été peints par les artistes contemporains de Breenbergh comme Van Laer, Andries Both ou encore Sébastien Bourdon[2].
Roethlisberger recense une copie d’après le dessin de Grenoble, conservée au département des arts graphiques du musée du Louvre, avec une représentation de Tobie et l’Ange au premier plan[3]. Par ailleurs, deux tableaux de l’entourage de l’artiste montrent ces ruines dans l’arrière-plan[4].


[1] Havard, 1881, III, p. 73.
[2] Voir à ce sujet cat. exp. Munich, 2014.
[3] Musée du Louvre, Inv. n° 22.546.
[4] Roethlisberger, 1981, n° R 92 et R 312, repr.

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