L'Apparition du Christ aux pèlerins d'Emmaüs

Laurent de LA HYRE
1656
162,5 x 178,5 cm
Crédit photographique :
VILLE DE GRENOBLE / MUSÉE DE GRENOBLE-J.L. LACROIX
Acquisition :
Saisie révolutionnaire en 1799, provient de la Grande Chartreuse.
Localisation :
SA09 - Salle 09

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Laurent de la Hyre fait partie, avec Eustache Le Sueur, de ces rares artistes français de l’époque de Louis XIII à n’avoir pas fait le voyage d’Italie. Ses débuts sont marqués par le maniérisme de la seconde école de Fontainebleau et par l’influence de son maître Georges Lallemand, dont il fréquente l’atelier en 1626. Si ses œuvres de jeunesse traitent volontiers de légendes puisées dans la littérature précieuse du temps, il évolue bientôt vers un style plus baroque et monumental qu’il met au service de grandes commandes religieuses. Dans les années 1640, son art abandonne tout lyrisme et toute sensualité pour adopter un mode d’expression à la fois sobre et raffiné, nourri de poésie antique ou de méditation spirituelle, caractéristique de « l’atticisme parisien ». Datées de 1656, ces deux œuvres ultimes de l’artiste, L'Apparition du Christ à sainte Madeleine _ et _L'Apparition du Christ aux pèlerins d'Emmaüs, commandées par le monastère de la Grande Chartreuse, maison mère de l’ordre, tout comme Le Christ mort sur la Croix _ de Philippe de Champaigne, sont comme l’aboutissement de sa carrière. Dépouillées de tout artifice, elles recueillent toute la science d’un artiste passé maître dans l’art des compositions rigoureuses et de l’expression des sentiments. Ces deux tableaux se présentent comme une sorte de diptyque, même s’ils étaient destinés à orner des chapelles différentes. Leurs thèmes, qui mettent en scène deux épisodes de la vie du Christ après sa résurrection, se répondent admirablement, tout comme leur traitement chromatique qui distribue savamment dans l’espace les zones de bleu et d’orange. La composition oblique de la scène nocturne répond à la distribution horizontale de son pendant diurne. Dans les deux cas, l’artiste porte une attention particulière au paysage, qui n’est pas ici un simple accessoire mais bien une composante essentielle de l’histoire. _L’Apparition du Christ à sainte Madeleine _, dont le récit est tiré de l’Évangile de Jean, raconte la rencontre de Madeleine avec Jésus, qu’elle prend pour un jardinier, alors qu’elle se rend à son tombeau au matin de Pâques. Elle découvre le tombeau vide et un ange vêtu de blanc que l’artiste situe dans un site montagneux qui n’est pas sans rappeler le massif de la Grande Chartreuse, avec ses conifères et ses rochers sombres. La composition de cette œuvre rappelle en tous points celle proposée par Le Sueur en 1651 pour le couvent des Chartreux de Paris et qui est également conservée à Grenoble (DG 2000-5-1). On y voit en particulier le même geste du Christ repoussant Madeleine de la main, le _Noli me tangere (Ne me touche pas) qui donne souvent son titre à ce thème. L’Apparition du Christ aux pèlerins d’Emmaüs, tirée de l’Évangile de Luc, met en scène la rencontre de Jésus avec deux disciples sur le chemin d’Emmaüs. Après s’être arrêtés dans une auberge, ceux-ci le reconnaissent enfin, au moment où il rompt le pain et le bénit. Là encore le paysage est un véritable morceau de bravoure. L’architecture grandiose, aux pavements de marbre et à l’escalier monumental, s’inscrit dans un magnifique écrin de verdure. La rigueur presque mathématique des compositions, le raffinement des coloris, l’expression mesurée des sentiments servent admirablement l’atmosphère dépouillée et ascétique propre à la dévotion des Chartreux. Saisies à la Révolution dans le monastère de la Grande Chartreuse, ces deux œuvres sont entrées au musée en 1799.

Un autre regard

  • France / XVIIe siècle

    Au moment où l'Europe entre en pleine période de Contre Réforme, les tableaux religieux deviennent des supports de dévotion, mais aussi de persuasion.

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