Etudes de figures
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Présenté et étudié pour la première fois lors de
l’exposition dédiée à Francesco Salviati (Rome,
Paris, 1998), le dessin a suscité des réactions
contrastées de la part des commentateurs.
Certains (Wolk Simon, op. cit.), s’étonnant du
caractère archaïque de l’emploi de la pointe de
métal sur un papier préparé, refusèrent l’attribution
à Salviati. En revanche, D. McTavish
(2000, op. cit.) affirma que Salviati était bien
l’auteur des deux dessins réalisés dans cette
technique ancienne, exposés en 1998 : celui de
Grenoble, et l’Académie d’homme assis du
Louvre [1] (inv. 10913) : « They further confirm
Salviati’s imaginative attitude forward drawing
and sureness of his hand. In the background of
the seated male nude (n. &-), the successively
wider and softer parallel lines of metalpoint
would seemto show the artist testing the limits
of the medium itself. » En réalité, l’analyse au
microscope binoculaire montrait que le dessinateur
avait également eu recours à la pierre
noire, adjointe à la pointe de métal [2]. À l’épreuve
de cette technique qui ne permet pas les hésitations,
Salviati démontre une rare maîtrise de la
ligne de contour, qui, par son acuité, renvoie
aux dessins de Bronzino.
Une meilleure lecture, après la restauration
récente du dessin, de l’inscription dans le bas
de la feuille : « Francesco Salviati », renforce
notre conviction qu’il s’agit bien d’un exceptionnel
dessin de l’un des plus grands dessinateurs
maniéristes italiens. Le rapprochement
proposé lors de l’exposition de 1998 avec les
inventions de Salviati, principalement celle de
la tapisserie de la Déploration du Christ
(Florence, Galleria degli Uffizi), reste valable.
Cette tapisserie, tissée à Florence par Nicolas
Karcher (Bruxelles ? actif à Ferrare en 1517 –
Mantoue, 1562) et son atelier, fut livrée au duc
Cosimo I de’Medici le 31 juillet 1546. Cette
composition avait déjà servi, mais avec un
développement beaucoup plus ambitieux, dans
la grande pala peinte par Salviati, au cours de
l’année 1540, à Venise, pour l’église du Corpus
Domini, aujourd’hui conservée à la Pinacoteca
di Brera, à Milan. Salviati la reprit à nouveau à
Florence, vers 1543-1548, dans une autre
Déploration du Christ (Florence, Galleria
Palatina), de format réduit. L’étude de tête
féminine tournée vers la gauche se retrouve
avec des variantes dans ces œuvres. Détail
révélateur de la méthode de l’artiste, basée sur
le dessin, le profil incliné, dans l’angle
supérieur gauche, pourrait avoir servi pour le
visage de l’ange penché vers l’Enfant Jésus
dans la Madone au perroquet (Madrid, Prado),
peinte à Florence. Ayant quitté Florence en
1548 pour poursuivre sa carrière à Rome,
Salviati conserva le souvenir du jeune homme
de profil, courbé, comme lové sur lui-même,
motif principal de la feuille d’études de
Grenoble, qu’il réintroduit à nouveau, et de
manière peut-être plus explicite encore, dans
la Déposition, placée sur l’autel de la chapelle
de la Pietà, à Santa Maria dell’Anima
(mai 1548-août 1550)7.
[1] Pointe de métal, pierre noire, rehauts de blanc, sur papier préparé gris. 36,4 x 22,7 cm.
[2] Curieusement, D. Jaffé, dans son compte-rendu du Burlington Magazine (1998, p. 346, note 3), tout en admettant implicitement l’attribution à Salviati du dessin de Grenoble, considère que celle du dessin Louvre (inv. 10913) est « less than certain ». À notre avis, les deux dessins sont inséparables : si l’on admet l’un comme étant de Salviati, force est aussi d’accepter l’autre, comme le fait D. McTavish. C’est aussi l’opinion de L.Walk Simon, mais cet auteur refuse de les attribuer à Salviati : « no. 116 [Grenoble] executed in a similar, self-consciously archaic metal point technique to no. 16 [Louvre] and possibly by the same hand but not, in my view, by Salviati ».
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