Life is so complex

Martial RAYSSE
1966
150,5 x 260 x 4,5 cm
Crédit photographique :
Ville de Grenoble / Musée de Grenoble-J.L. Lacroix
Acquisition :
Achat à la Galerie Alexandre Iolas en 1968
Localisation :
SA39 - Salle 39

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Exaltant « le monde moderne, l’optimisme et le soleil », le travail de Martial Raysse se place d’emblée sous l’égide de l’esthétique pop. Souvent considéré au début des années 60 comme le plus pop des créateurs français, l’artiste affirme en toute provocation son credo : « L’art actuel, c’est une fusée dans l’espace. Les Prisunic sont les nouveaux musées d’art moderne. » Étudiant en lettres à l’Université de Nice, Raysse hésite un temps à se consacrer à la littérature mais la peinture de Dubuffet et le travail des « mauvais peintres » de la Côte d’Azur le convainquent de se consacrer à l’art. Dès 1959, jouant avec les archétypes de la société de consommation, Raysse enferme des objets dans des boîtes et colonnes en plexiglas. L’assemblage et la combinatoire s’affirment comme les fondements de sa démarche artistique. Marqué par le contexte niçois, celui de la plage et des loisirs, Raysse crée « un monde neuf, aseptisé et pur » qu’il nomme « hygiène de la vision », où priment la jeunesse, l’univers domestique et l’imagerie féminine. Il se joint en 1960 aux Nouveaux réalistes placés sous la houlette de Pierre Restany, dont le mot d’ordre est l’aventure de l’objet de consommation sous toutes ses formes. Présenté à l’exposition Dylaby d’Amsterdam en 1962, Raysse Beach, théâtre balnéaire associant pin-up colorées et accessoires de plage, lui vaut une reconnaissance internationale, notamment aux États-Unis où il exposera régulièrement jusqu’en 1968.
La série des Tableaux à géométrie variable à laquelle appartient Life is so complex marque une césure dans son œuvre, un affranchissement vis-à-vis de l’esthétique bariolée du Pop art. Extrait d’un magazine de mode ou d’une publicité, le visage standardisé d’une icône sexy apparaît décomposé sur douze plaques de plexiglas rectangulaires. Ici, un œil en amande cerné de noir, là une bouche idéale peinte en rouge, plus loin l’ovale parfait d’un visage. L’image d’esprit pop n’est pas sans rappeler les femmes pulpeuses et étrangement anonymes de Tom Wesselmann, mais elle est comme colonisée par l’esthétique minimale : modules, permutations et goût de l’épure. Raysse affirme vouloir « créer [ses] propres objets préfabriqués, [ses] prototypes, afin de substituer aux clichés sociaux [ses] clichés personnels ». Le titre évoque un slogan publicitaire tandis que le plexiglas et la peinture à l’aérographe rappellent le goût de Raysse pour les enseignes et le néon. On est ici très loin des premières compositions enjouées de l’artiste. Avec ses peintures-puzzles aux configurations aléatoires, Raysse interroge nos existences hétérogènes, notre vision kaléidoscopique. Tendant à l’abstraction, les « Formes en liberté » achèvent le revirement de l’artiste, qui, retiré dans le midi de la France, revient à une peinture plus traditionnelle au début des années 70.

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