Le Moulin à eau

Jean-Baptiste Marie PIERRE
1758
21,8 x 33,6 cm
Crédit photographique :
VILLE DE GRENOBLE / MUSÉE DE GRENOBLE-J.L. LACROIX
Acquisition :
Modes et date d'entrée inconnus (probablement collection L. Mesnard).

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Etudiée pour la première fois en 1994 par Lionel Bergatto, cette feuille signée et datée fait partie aujourd’hui d’un groupe de paysages à la sanguine, réalisés par Jean-Baptiste-Marie-Pierre, l’une des personnalités majeures de la vie artistique française durant les règnes de Louis XV et de Louis XVI.
Formé sans doute par Bertin et Natoire (MG D 991), Pierre obtient le Grand Prix et séjourne à l’Académie de France à Rome entre 1735 et 1740. Reçu à l’Académie royale à son retour, il ambitionne de briller dans tous les genres mais montre une prédilection pour la peinture d’histoire, dans la grande manière de Jouvenet et de Le Brun. Sur une scène artistique dominée par Boucher, Vanloo et Natoire, Pierre s’affirme progressivement en exposant régulièrement au Salon et devient l’un des peintres d’histoire les plus en vue, au tournant des années 1750. Cette dernière décennie est également marquée par la participation de l’artiste à des commandes prestigieuses, aussi bien religieuses (églises Saint-Roch, Saint-Sulpice) que décoratives (hôtels Lambert et Rohan-Strasbourg ; châteaux de Fontainebleau, de Bellevue, de Versailles et de Potsdam ; cartons de tapisseries pour les Gobelins). C’est à la fin de cette intense période de production que se situe, par sa date, le dessin de Grenoble.
La pratique du paysage chez Pierre remonte à ses années de formation et doit certainement beaucoup à l’enseignement reçu de Nicolas Vleughels à l’Académie de France à Rome. Ce dernier encourageait en effet les pensionnaires à dessiner « au-dehors » et à observer « la bizarrerie de la nature, les sites merveilleux, l’arrangement des fabriques ». Ce goût pour le pittoresque allait dominer la peinture de paysage dans les années 1740-50 et en constituer l’une des principales nouveautés. On en retrouve tous les éléments dans le présent dessin : un sentiment de nature sauvage, des plans d’eau et ruisseaux qui creusent l’espace et une petite fabrique, autour de laquelle toute cette nature s’articule. Le motif du moulin est récurrent dans les paysages pittoresques et tire en partie sa source du célèbre jardin du Moulin Joli, aménagé par Claude-Henri Watelet, dont la principale fabrique était un moulin dont la roue à aube se situait sous le bâtiment. Proche ami de Watelet, comme le prouvent les gravures réalisés avec ce dernier (MG D 1348), Pierre était un familier du Moulin Joli, dont il avait réalisé des vues dessinées . La sanguine brûlée est l’une des techniques privilégiées, utilisées par Pierre dans la presque totalité de ses dessins de paysages. Nicolas Lesur et Olivier Aaron ont mis en relation l’inscription de cette feuille avec celles de deux autres sanguines de mêmes dimensions, datées de 1760 et 1762 . Ces feuilles auraient appartenu au même collectionneur, probablement un familier de Pierre qui serait l’auteur de ces annotations.

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