Bord de rivière

Au XVIIe siècle, âge d’or de la peinture hollandaise, le paysage est considéré comme un genre majeur. À l’instar de ses aînés Esaias van de Velde et Hendrick Avercamp puis son neveu Jacob van Ruisdael, Salomon van Ruysdael se spécialisa dans le paysage réaliste, vu à hauteur d’homme, la ligne d’horizon basse permettant d’accorder une grande place au ciel. Comme pour Jan van Goyen, dont il est stylistiquement très proche, ses motifs privilégiés sont des bords de fleuves où se reflètent bateaux, arbres et maisons. Sa palette tend à la monochromie et le véritable sujet de l’œuvre est désormais cette poésie émanant d’une atmosphère lumineuse mêlant l’eau et le ciel. Bord de rivière (signé et daté par l’artiste sur le tonneau flottant silencieusement à la surface de l’eau) témoigne de cette tendance dans la production de l’artiste des années 1620 à 1640. Le peintre choisit un support en bois pour obtenir une surface lisse et un format étiré adapté à l’horizontalité d’un paysage fluvial. Le ciel et l’eau sont rendus par une matière fine et transparente. La composition repose sur une alternance de plans horizontaux et sur l’ouverture de deux espaces : celui, plein, de la berge à droite, et celui du ciel à gauche. En bas, la bande formée par l’élément liquide est ponctuée par les verticales des mâts et des voiles des embarcations et par le mur d’une chaumière. Sur la droite, une ligne d’ombre souligne une mince bande de terre éclairée par le soleil, rive qui s’épaissit légèrement vers le bord du tableau. Cette ouverture est amplifiée à son tour par la ligne oblique de la végétation. Le ciel, auquel le peintre consacre plus de la moitié du panneau, ouvre à son tour l’espace vers la gauche. Le calme et l’unité du paysage sont traduits par la douceur des teintes, subtil camaïeu de vert amande, brun et gris bleuté créant une harmonie argentée. Seul un arbre aux branches tortueuses se découpant sur le ciel clair ajoute une note pittoresque à la scène, la silhouette irrégulière de son feuillage, traité par petites touches, trouvant un écho lointain dans les formes souples des nuages en mouvement.